Taux d’usure & crédit immobilier en 2023 : comment ça fonctionne ?
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Face à la hausse des taux des prêts, il a été décidé en Janvier 2023, de mettre à jour le taux d’usure de manière mensuelle plutôt que de manière trimestrielle.
Ainsi de nombreux potentiels emprunteurs ont pu avoir accès au crédit bancaire afin de financer leurs acquisitions.
Que signifie le taux d’usure ? À quoi sert-il et qui le fixe ? Pourquoi ce taux est dorénavant fixé de manière mensuelle plutôt que trimestrielle ? Quel est l’impact sur le secteur immobilier ?
Le taux d'usure, c’est quoi ?
Définition
Du latin Usura signifiant « intérêts de l’argent », le taux d’usure est le taux au-delà duquel il est interdit pour un emprunteur de prêter de l’argent. Les prêts sont souscrits auprès des banques pour un montant, une durée et un taux prévus.
Lors de la présentation de l’offre, la banque fournit à l’emprunteur le Taux annuel Effectif Global (TAEG). Il s’agit du taux d’emprunt incluant les frais annexes (assurance emprunteur, frais de dossiers, intérêts du prêt, frais de garantie…). Un prêt est usurier et donc illégal, lorsque le taux annuel effectif global (TAEG) est supérieur au taux d’usure fixé par la Banque De France.
Le taux d’usure est mis en place afin de protéger l’emprunteur de souscrire à un prêt à un taux trop élevé mais également à empêcher celui-ci de se surendetter. En effet, les banques fixent le taux d’intérêt en fonction du risque pris. En l’absence de taux d’usure, les banques pourraient être tentées de prêter à des individus peu solvables, à des taux d’intérêts élevés.
Le taux d’usure en France
Le taux d’usure est fixé de manière trimestrielle par la Banque de France. Pour définir le taux d’usure pour une catégorie de prêts, la Banque de France calcule la moyenne pondérée des TAEG de prêts octroyés par les banques lors du trimestre précédent et le majore d’un tier. Elle obtient ainsi le taux d’usure du trimestre suivant pour chaque catégorie de prêts. Celui-ci est publié périodiquement sur le site de la Banque de France.
Taux d’usure : évolution et impact
Comment le taux d’usure évolue-t-il ?
À la fin du second semestre 2022, le taux d’usure était considéré comme trop bas et n’évoluait pas aussi vite que l’augmentation des prix due à l’inflation. Ainsi de nombreux dossiers de prêts étaient refusés ou reportés car le TAEG était supérieur au taux d’usure.
En effet, les profils les plus à risques pour les banques (personnes âgées, personnes avec des antécédents médicaux, primo accédants …) se voyaient refuser leur prêt car leur TAEG dépassait le taux d’usure. Il a donc été décidé de recalculer le taux d’usure de manière mensuelle afin que ce dernier intègre plus rapidement les variations du marché.
Quel est l’impact du taux d’usure sur les prêts immobiliers ?
Prenons par exemple : un emprunteur désire acheter une maison d’une valeur de 300 000 euros. Il a la capacité de payer une mensualité de 1500 euros par mois. Avec un taux d’intérêt à 1%, sa mensualité sera de 1465 euros (avec un cout total du crédit de 51 524 euros). Si le taux d’intérêt passe à 2%, la mensualité passe alors à 1603 euros par mois (Cout du crédit 84 636 euros), ce qui n’est plus dans le budget de l’emprunteur qui devra alors trouver un bien d’une valeur maximale de 280 000 euros. Le pouvoir d’achat de l’acquéreur a donc diminué. Ce phénomène entraine donc une baisse des prix de l’immobilier.
En revanche, si l’acquéreur souhaite acquérir le bien initial à 300 000 euros, le risque est plus important pour la banque qui doit alors augmenter son taux d’intérêt pour que le prêt soit rentable. De plus le Haut Conseil de stabilité financière (HCSF) a descendu le taux d’endettement maximum à 35%. Ce qui veut dire que le rapport des charges d’emprunt et du revenu du ménage ne peut pas dépasser 35%. Il devient donc plus compliqué de contracter un prêt.
Évolution du taux d’usure en 2023
Notons qu’à l’étranger le taux d’usure est bien plus élevé. Par exemple, il est de 6,5 % en Italie, 10 % en Belgique, et même de 18 % en Suisse.
Pourquoi les taux ont-ils augmenté ?
En théorie, lorsque le taux directeur augmente, non seulement les taux d’intérêt augmentent, mais l’épargne est mieux rémunérée. Ceci a pour but de diminuer la demande, car le consommateur préfère attendre avant d’emprunter et d'épargner son capital disponible. Ce phénomène, couplé à la stabilisation des salaires (car baisse des anticipations d’inflation) permet de ralentir l’inflation.
Depuis mars 2022, les taux d’usure n’ont cessé d’augmenter suivant la tendance de la hausse générale des taux. La BCE a augmenté le taux directeur en juillet 2022 pour contrer une inflation galopante. Cette hausse implique une augmentation du coût de financement des banques. Les taux d’intérêts qu’elles proposent alors aux emprunteurs sont plus élevés. Les taux d’usure étant corrélés aux variations des taux d’intérêt, augmentent également.
Selon Michel Mouillart (professeur d’économie et spécialiste de l’économie immobilière), il semble que les taux d’intérêt continueront leur ascension en 2023. En effet, bien que les tensions inflationnistes se stabilisent en 2023, la BCE devrait continuer de durcir sa politique monétaire et les taux continueront d’évoluer. Il faudra attendre 2024 et le ralentissement de l’inflation pour assister à une baisse des taux d’intérêts. Néanmoins, ces derniers resteront élevés encore quelques années comparativement à la situation au début 2022.
Taux d’usure en 2023 : actualités et conseils
Actualité taux d’usure en France en 2023
Au début de l’année 2022, il était possible d’emprunter à un taux avoisinant les 1,08 %. Aujourd’hui, ce taux atteint les 3 %.
Depuis le 1er février 2023 et jusqu’à juillet 2023, le taux d’usure est recalculé tous les mois afin de suivre l’évolution haussière des taux et de débloquer certains dossiers de prêts qui dépassaient le taux d’usure. En effet, en plus de permettre à des ménages d’accéder à des prêts immobiliers (alors qu’ils n’étaient pas éligibles, car le taux de leur emprunt dépassait le taux d’usure), l’évolution mensuelle du taux d’usure permet également d’éviter l’effet coup de ciseaux auquel étaient confrontées les banques au début de chaque trimestre.
La hausse du taux d’usure survenant tous les trois mois, le nombre de dossiers devenant éligibles au même moment était très important. La mise à jour mensuelle permet d’étaler la mise en place de nouveaux crédits.
Conseil : acheter en 2023 avec la hausse du taux d’usure
La hausse des taux peut laisser penser qu’il vaut mieux mettre en pause son projet d’acquisition immobilière. Ce choix n’est pas forcément judicieux. En effet, il n’est pas possible de prévoir jusqu’où les taux vont monter et quand ils entameront leur baisse. De plus, rappelons que la hausse des taux entraîne en général une baisse du prix de l’immobilier. En fonction du bien, la hausse des taux d’intérêt peut être compensée par la baisse du prix d’acquisition du bien.
Les principaux touchés par la hausse des taux de prêts immobiliers sont les primo-accédants. Ces derniers peuvent néanmoins profiter des dispositifs mis en place en leur faveur comme le prêt à taux zéro (PTZ) ou encore le prêt accession Action Logement à taux réduit.
En conclusion, le taux d’usure est le taux maximum (TAEG) qu’une banque peut proposer à ses clients pour une catégorie de prêt. Or, la hausse du taux directeur a entraîné une augmentation rapide des taux d’emprunts immobiliers.
Le taux d’usure quant à lui, bien que corrélé aux taux d’emprunt n’a pas évolué assez vite. Il a donc été décidé de le mettre à jour mensuellement (entre février et juillet 2023) au lieu d’une fois par trimestre. Malgré cette mesure, de nombreux dossiers de prêts immobiliers restent bloqués au niveau des banques, car leur taux d’emprunt dépasse le taux d’usure.
Néanmoins, cette hausse des taux est compensée par une baisse du prix de l’immobilier qui peut encourager ceux qui le peuvent à acquérir des biens.